Dans « Le banquet des Empouses », Olga Tokarczuk, prix Nobel de littérature en 2018, s’inspire de « La montagne magique » de Thomas Mann et déploie un récit onirique et envoûtant se déroulant dans les magnifiques paysages de Basse-Silésie.

Cette réécriture contemporaine et féministe raconte l’histoire de Wojnicz, un jeune homme tuberculeux en décalage avec son époque qui est envoyé faire une cure dans un sanatorium. Là-haut, à la Pension pour Messieurs, il fréquente une communauté d’intellectuels aux idées datées et misogynes (toutes sont véridiques, inspirées d’auteurs reconnus) et se lie d’amitié avec Thilo. Tout se passe « pour le mieux » dans cet environnement propice à la détente, à la fois hors du monde et sous contrôle, jusqu’a ce que Klara Opitz, la compagne d’un médecin de l’établissement, soit retrouvée morte dans des circonstances mystérieuses. En discutant avec Thilo, Wojnicz découvre que ce n’est pas la première fois que des morts suspectes et des disparitions sont signalées…

L’une des particularités de ce roman, c’est qu’il est écrit du point de vue des Empouses, avec tout ce que cela implique d’étrangeté et de distorsions : ce sont des créatures démoniaques féminines, des spectres issus de la mythologie qui la nuit charment et tuent les hommes. Ce « roman d’épouvante naturopathique » nous plonge dans une atmosphère fantastique, hallucinée, ensorcelante. Avec un style hypnotique et sophistiqué, Olga Tokarczuk joue avec les temporalités, brouille les frontières entre les genres et nous offre une superbe méditation sur le temps, l’éducation et l’identité.

Ce triptyque érotique dépeint le portrait d’une femme ambitieuse à la recherche des plaisirs les plus crus, une quête au cœur de laquelle l’émancipation féminine tient une place importante. À travers trois récits ("Histoire de la bergère", "Histoire de la bonne" et "Histoire de l’affranchie"), l'héroïne se révèle et se métamorphose au fil des rencontres et des explorations qu’elle fait du corps. La sensualité y est débordante et parfaitement décrite. La plume de Léo Barthe (pseudonyme de Jacques Abeille) dégage une telle puissance qu'on pourrait qualifier d’œuvre pornographique ce triptyque érotique composé d'une pluralité de thèmes tant soif de liberté, insoumission, mystère et tragédie émanent de cette héroïne.

Marcel Béalu nous offre une très belle anthologie de poésie érotique de langue française qui parcourt les siècles, du XVème au XXème. De façon chronologique, le lecteur y retrouve une centaine de poètes et poétesses. Le désir et le plaisir sont évoqués parfois avec un langage cru, parfois de façon plus allégorique, selon le siècle auquel appartenait l'artiste. Louise Labé, Guillaume Apollinaire, Joyce Mansour, René de Obaldia, Théophile Gautier ... Leurs textes sont accompagnés de très belle façon par les illustrations délicates de Louise Bourgoin. Ces différentes silhouettes éclairent de jolie manière tous ces poèmes qui permettent de cerner aussi la façon dont le sexe a été perçu au fil des siècles par les écrivaines et les écrivains.

Treize autrices nous livrent dans ce recueil différentes nouvelles, dévoilant le désir et son impact sur le quotidien des femmes. Les textes éveillent chez les lecteurs et les lectrices une palette d’émotions intenses avec des scénarios plus ou moins obscènes dans lesquels le plaisir féminin domine.
De l’exhibitionnisme à la soumission, cet ouvrage aborde plusieurs représentations de la sexualité et questionne notamment la liberté des fantasmes. Peut-on être féministe et aimer sexuellement la domination masculine ? Comment assumer ses désirs sans avoir peur du jugement de Mona Chollet ? Ancrée dans l’actualité, "Indécentes" est une parfaite illustration de la littérature érotique d’aujourd’hui et des revendications qui l’entourent. Celui-ci est donc indéniablement une bonne manière de découvrir ou redécouvrir ce genre et ses multiples perceptions.

Mahir Guven a des choses à dire. Et s'il a tenté de déployer une version géante de "Rien de personnel" devant le Conseil Constitutionnel au moment du vote de la Loi sur l'immigration, puis que cette même version géante a été accueillie au sein du musée de l’Histoire de l’immigration pendant plusieurs jours, c'est que l'écrivain a une histoire à transmettre. « Voici la vie d’une famille immigrée. Il suffit de lire. » était-il écrit en énormes caractères. Son récit est sous-titré "Vies françaises de la famille Güven", parce que des vies il y en a plusieurs au sein de ce récit familial autobiographique. En s'inspirant de ces vies pleines d'anecdotes, d'accidents, de joies, de galères, de rencontres, de combats, d'amitiés et du courage des femmes, Mahir Guven mène une réflexion de fond sur l'expérience de l'immigration. C'est en devenant père que cette nécessité d'écrire est née. Un récit qui oblige à faire un pas de côté dans notre vision de la France et de l'importance de la langue notamment. Cette lecture est éclairante.