Où vont les doudous quand ils meurent ?
Une aventure de yaël et son doudou docteur
De Gilles Rapaport, Laurence Salaün
Seuil Jeunesse
L’humour est bien sûr présent, ce qui rend la lecture joyeuse, mais de réels questionnements sont soulevés et il est certain que le lecteur aura vivement envie de discuter des sujets abordés après avoir refermé le livre. Cet album présenté comme une bande dessinée est ainsi parfaitement adapté pour réaliser un premier débat philosophique avec les plus jeunes et déclencher leurs idées et les confronter à celles du texte : le jeune lecteur voudra-t-il lui aussi jeter ses vieux doudous ou les conserver toute sa vie ?
Les autrices entretiennent notre perplexité (et s’en amusent). Elles construisent méticuleusement le parcours du garçon, le contenu de ses journées routinières (« certaines journées sont longues ») à la cuisine, au bureau (3 crayons), à table (3 cuillerées de sucre)… La simplicité de l’écriture ludique et joueuse et celle de l’illustration (utilisation du bleu, blanc, marron mousseux) subjuguent tout comme l’évidence de l’amitié. Une ode à la joie.
Dans cette adaptation brillante du roman éponyme de Charles Ferdinand Ramuz, Fabian Menor rassemble l’essentiel du récit et le recompose autour du couple d’Antoine et Thérèse, jeunes mariés très épris que l’obligation saisonnière de mener les bêtes à l’alpage va séparer. Fabian Menor signe là une interprétation du drame très intense avec son trait vigoureux, sans concession, certainement réaliste, d’où il émane une grande pureté de cœur, et beaucoup de sensibilité.
Le lecteur peut suivre l’apicultrice dans l’accomplissement de ses différents gestes : enfiler sa combinaison, sortir le cadre et utiliser l’enfumoir, capturer au filet la reine. Mais surtout, loin de l’image d’Épinal, le métier d’apicultrice est abordé avec vérité, notamment dans sa confrontation avec l’agriculture industrielle, ce qui n’est pas si fréquent dans ce type d’album.
La scène de Maya, à la tonalité rose fuchsia en hommage au féminisme de la fillette, brosse le portrait de la jeune metteuse en scène qui se retrouve tiraillée entre ses aspirations égalitaires et sa volonté de contrôle. Humour, tendresse et sensibilité accompagnent la plume de l’autrice-illustratrice lorsqu’elle dépeint les contrariétés de ce personnage pétillant qui trouvera en elle la sagesse de descendre de son trône pour admettre son erreur.